GABRIEL GODARD S’EN EST ALLÉ…

À quatre-vingt dix ans, le peintre de renommée internationale est parti. En humaniste. 

Gabriel Godard s’en est allé rejoindre les êtres qu’il a toujours défendus. Godard est un peintre humaniste. Comme Picasso fit Guernica, Godard est celui qui a montré l’horreur d’Oradour-sur-Glane

Autodidacte, Gabriel Godard est né le 28 avril 1933 à Delouze, en Lorraine. Il commence à peindre dans les années 50. D’abord figuratif, il ne considère bientôt plus le sujet que comme un prétexte à la composition. L’artiste vivait à Vair-sur-Loire, commune limitrophe d’Ancenis. 

« Il y a toujours une cruelle différence entre ce qu’on fait et ce qu’on poursuit. Mais de la naissance à la mort, un homme n’a d’autres rôles à jouer que de « se » vivre au mieux et tenter d’arriver à sa fin avec le sentiment de n’avoir triché, ni avec lui-même, ni avec les autres, et c’est sans doute cette différence continuelle qui le pousse en avant toujours, vers je ne sais quelle vérité fondamentale dont il porte l’intuition comme un germe. » écrivait-il. 

Les membres du conseil municipal d’Ancenis-Saint-Géréon ont fait part de leur émoi : 

« Nous apprenons avec une grande tristesse le décès du peintre Gabriel Godard. Voici tout juste un an, nous organisions une rétrospective de son œuvre à la Chapelle des Ursulines. À cette occasion, il nous avait reçus chez lui avec beaucoup d’enthousiasme et une grande sensibilité. La préparation de cette rétrospective lui faisait revivre des moments forts de sa vie d’artiste et l’émotion affleurait dès qu’il évoquait telle ou telle période, les rencontres avec d’autres artistes majeurs qui l’avaient inspiré... Voici un an encore, il expliquait devoir peindre chaque jour, comme un besoin impérieux et vital. Même si son art était passé du figuratif à ses débuts – et inspiré de son enfance à Tunis – à l’abstraction, on pouvait y retrouver les couleurs de bords de Loire qui lui étaient chers, l’écorce des arbres, la mer.... 

La Chapelle des Ursulines d’Ancenis-Saint-Géréon avait été l’écrin de deux autres grandes expositions : à l’occasion de l’inauguration de la chapelle restaurée en 2008, et en 2016, lors de la présentation de son témoignage pictural et monumental du massacre d’Oradour-sur-Glane. Il livrait son témoignage et son ressenti face à l’horreur et tous, nous gardons en mémoire la force de cette œuvre. En 2022, il a fait don de cette fresque au Centre de la Mémoire d’Oradour-sur-Glane

À Ancenis-Saint-Géréon, il restera toujours très présent puisqu’une de ses œuvres, « L’autre rivage », accompagne tous les grands moments de la ville dans la salle du conseil. 

Ici, sur les rives de la Loire, et outre-Atlantique, où il était également très connu, c’est pour tous un grand artiste qui s’éteint. Nos pensées vont à sa famille. » Rémy Orhon, Maire d’Ancenis-Saint-Géréon, Fanny Le Jallé, Adjointe à la culture. 

UN GRAND ARTISTE QUI S’ÉTEINT… 

Le peintre Gabriel Godard est décédé, lundi 4 décembre 2023 à l’âge de 90 ans. On lui doit, notamment, une œuvre monumentale consacrée au massacre d’Oradour-sur-Glane. 

En 2004, il disait se plaire au bord de la Loire où « le chant des oiseaux rappelle que nous sommes vivants ». Il avait choisi de s’installer au Bernardeau, un lieu-dit de Vair-sur-Loire, depuis les années 1980. 

« C’était un personnage de la commune », estime Éric Lucas, le maire de Vair, qui se souvient que le peintre avait fait don d’un de ses tableaux à la mairie en 2004. 

Un autre don de toile a marqué la carrière du peintre : c’est celui de son œuvre monumentale – vingt toiles de plus de 3 x 9 mètres chacune – consacrée au massacre d’Oradour-sur-Glane qui l’a tant marqué enfant. « J’avais 11 ans à l’époque. L’émotion ne m’a jamais quitté », confiait-il à Ouest-France en octobre 2016. Quatre ans plus tard, en septembre 2020, Gabriel Godard décidait de faire don de son œuvre au Centre de la mémoire d’Oradour. 

« Tout comme Picasso avait fait son Guernica, Gabriel Godard avait décidé de faire une grande œuvre sur le massacre d’Oradour-sur-Glane, raconte Thierry Babin. Il a mis trois ans pour réaliser l’œuvre. Cela a été lourd, éprouvant et épuisant. » 

Né en 1933 à Delouze, en Lorraine, et après une enfance passée en partie en Tunisie, Gabriel Godard s’était mis à la peinture dans les années 1950 après avoir longuement hésité avec la poésie et le piano. À ses débuts, « c’était un peu cafouilleux, mais très vite mon écriture était née », se souvenait-il lors d’un entretien accordé à Ouest-France en 2022. 

Sa première exposition ? En 1957, à Paris. La même année, les prix récompensant les artistes tombaient : Fénéon, Fontainebleau ou encore celui de la Jeune peinture... La carrière de Gabriel Godard était lancée dans l’Hexagone. Certaines de ses toiles sont allées au musée d’art moderne de Paris ou encore au Centre Pompidou. Mais c’est outre-Atlantique, aux États-Unis, qu’il va le plus se faire connaître. À New York, la galerie Findlay va même jusqu’à demander à avoir l’exclusivité de ses peintures durant près de trente ans. 

D’abord figuratif, Gabriel Godard s’était pris d’amour pour l’abstrait au milieu des années 1980. « Je me sens mieux dans l’abstraction où l’imaginaire a toute sa place », racontait-il en 2022. Dans ce même entretien, il se confiait sur sa passion pour la peinture : « C’est une chose dont j’ai besoin, que je ressens comme on ressent la qualité de la musique. » 

Thierry Babin confirme : « Il y avait une musicalité dans ses œuvres. C’était d’ailleurs sa puissance. Il composait cela comme s’il écrivait une musique. Il ne se sentait pas simplement peintre. Gabriel Godard s’amusait à nous dire que ce n’était pas lui qui peignait. Il se laissait transporter et cela venait de l’au-delà. C’était sa façon d’être humble et de nous laisser entrer dans sa peinture. » 

« Il a vécu toute sa vie de sa passion et, malgré le succès, il est resté très abordable, accessible », signale Bruno Rigaud. Thierry Babin partage ce sentiment : « C’est un peintre qui méritera à nouveau d’être reconnu. » 

« Il devait peindre chaque jour, comme un besoin impérieux et vital », se remémorent Rémy Orhon, maire d’Ancenis-Saint-Géréon et Fanny Le Jallé, son adjointe à la culture. Il y a tout juste un an, la ville avait accueilli une rétrospective de l’œuvre de Gabriel Godard.
« À cette occasion, il nous avait reçus chez lui avec beaucoup d’enthousiasme et une grande sensibilité. Ici, sur les rives de la Loire, et outre-Atlantique, où il était également très connu, c’est pour tous un grand artiste qui s’éteint. » 

Les obsèques de Gabriel Godard se dérouleront samedi 9 décembre en l’église de Saint- Herblon (commune déléguée de Vair-sur-Loire). Basile CAILLAUD. 

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